Julien Simon a vécu une saison 2015 pour le moins contrastée : en quête d'une victoire durant toute l'année, le Lamballais de la formation Cofidis a pourtant le sentiment d'avoir franchi un nouveau palier au niveau World Tour. Le Breton espère en tirer les dividendes l'an prochain.
 
Julien Simon, vous avez mis un terme à votre saison au soir du Tour de Vendée. Quel bilan en faites-vous ?
C'est assez paradoxal. Au niveau résultat, c'est sans doute l'une de mes moins bonnes saisons. Je n'ai pas gagné, je n'ai pas obtenu énormément de places d'honneur. Malgré cela, je sens que j'ai progressé dans le Pro Tour. J'ai été davantage acteur que les saisons passées. J'ai également couru avec plus d'assurance en World Tour.  C'est le point positif de ma saison. J'ai la sensation d'avoir passé un cap à ce niveau-là et j'espère en tirer profit dès la saison prochaine. J'espère parvenir à concrétiser en 2016 (Il vient de resigner pour deux ans avec Cofidis).
 
Comment expliquez-vous ce paradoxe entre l'absence de gros résultats et ce nouveau cap en World-Tour ?
Sans chercher d'excuses, j'ai connu quelques soucis en début de saison. Je suis tombé malade une première fois (varicelle avant le Challenge de Majorque) puis une deuxième fois (grippe avant le Tour du Haut-Var). Au championnat de France, je n'ai pas non plus eu de chance. Pareil lors de la Clasica San Sebastian où je suis tombé à 200 mètres de la ligne d'arrivée… Mentalement, toutes ces contrariétés n'ont pas été simples à encaisser dans la mesure où j'avais consenti beaucoup de sacrifices pour être au niveau. C'est comme ça… Si je continue de bien travailler, j'espère que je vais être récompensé la saison prochaine. J'espère que la roue va tourner.
 
Votre rôle a également évolué au sein de la formation Cofidis depuis l'arrivée de Nacer Bouhanni. Vous êtes souvent un équipier de luxe…
Depuis la venue de Nacer chez Cofidis, c'est vrai, que mon rôle est souvent différent. Mon calendrier a également changé : j'ai disputé moins de manches de Coupe de France que par le passé. C'est plus compliqué de gagner ou même de faire des podiums sur des courses du Pro Tour que sur des manches de la Coupe de France. Quand j'ai couru en Coupe de France, j'ai souvent répondu présent (2ème du Grand Prix de Plumelec-Morbihan, 3ème du Tour du Finistère). Sur les autres manches, j'ai bossé pour Nacer, au Dauphiné, j'ai bossé pour Nacer, au championnat de France, j'ai bossé pour Nacer… Je n'ai pas eu beaucoup d'opportunités, finalement. D'un autre côté, je suis persuadé que le fait d'épauler un coureur comme Nacer Bouhanni m'a fait progresser.
 
Comme Bouhanni, vous êtes également un gagneur. N'êtes-vous pas un peu frustré de mettre vos ambitions entre parenthèses ?
J'ai eu ma chance lors de la première partie de saison. Je ne suis pas frustré, je sais que sur les courses par étapes, il y a des toujours arrivées qui me conviennent. Et puis, Nacer Bouhanni est quand même beaucoup plus rapide que moi au sprint. C'est normal de bosser pour lui.
 
En début de saison, comment avez-vous  vécu l'arrivée de Nacer Bouhanni chez Cofidis ?
Très bien. Quand il a signé, je me suis douté que j'allais devoir travailler pour lui et c'est normal. Il fait quand même partie des meilleurs sprinteurs au monde. C'était clair. Je savais aussi que j'aurais toujours ma chance sur des profils type Tour du Pays Basque, Tour de Catalogne…
 
Vous avez mis Nacer Bouhanni plusieurs fois sur orbite. On se souvient notamment de la façon dont vous l'avez propulsé vers la victoire sur le Dauphiné…
Ça avait bien fonctionné là-bas, c'est vrai. Après, Nacer a vu que je jouais le jeu, du coup il était content que je sois là. On a failli refaire le coup lors du championnat de France, malheureusement… J'ai pris du plaisir à travailler pour lui. Cela procure également des émotions de favoriser la victoire d'un leader. Bon, j'aime aussi gagner, je ne pourrais pas non plus faire cela toute l'année. Je ne fais pas partie de son train.
 
On apprend beaucoup aux côtés d'un leader ?
Complètement. Personnellement, je le trouve impressionnant. Il ne lâche jamais, c'est un bosseur, il est super exigeant envers lui-même. Il n'est jamais rassasié. Il ne laisse rien au hasard. C'est un champion. Du coup, on progresse tous à ses côtés. Il tire le groupe vers le haut. Certains coureurs de l'équipe Cofidis ont réussi à l'emporter en 2015 parce que Nacer fait partie de l'équipe. Ils ont progressé en bossant pour lui, ils ont pris de la caisse.
 
Avez-vous des regrets sur cette saison 2015 ?
On a toujours des regrets. Lors du Grand Prix de Plumelec, par exemple, ça s'était joué à pas grande-chose. Si j'avais été dans la roue de Vuillermoz… Pareil lors de la Clasica San-Sebastian : si je n'avais pas chuté, je n'aurais peut-être pas gagné mais le podium était à ma portée. Ça aurait été bien… Après, mon plus gros regret, je l'ai sans doute eu lors de la 4ème étape du Tour d'Espagne, le jour où je termine 7ème. J'avais les jambes pour gagner ce jour-là. J'ai trop hésité, c'était n'importe quoi. Avec des si… Quand j'ai terminé 2ème à Plumelec et 2 sur une étape du Tour d'Espagne, je suis tombé sur plus fort mais le jour de ma 7e place, il y avait de la place pour gagner.
 
Pour la première fois, vous avez enchaîné Tour de France et Tour d'Espagne. Comment avez-vous vécu cet enchaînement ?
Je ne le regrette pas. J'appréhendais un peu d'autant plus que j'avais chuté à San Sebastian et que j'abordais donc la Vuelta un peu dans l'inconnu. Finalement, ça s'est plutôt bien passé. Je n'ai pas fini le Tour d'Espagne complètement vidé. Cela m'a permis également de voir autre chose, de voir d'autres courses. J'avais besoin de changer de programme. On verra l'an prochain mais c'est quelque chose qui pourrait se reproduire même si j'aimerais également disputer les épreuves de Montréal et du Québec qui se déroulent au même moment. Ça peut-être une autre option.
 
Vous avez disputé votre 4ème Tour de France l'été dernier. En êtes-vous satisfait ?
Je l'ai mieux vécu que celui de l'an dernier. Je suis passé tout près d'un petit résultat. Si j'avais moins hésité… Cela dit, je l'ai abordé dans des meilleures dispositions, je me sentais mieux. J'ai réussi à progresser là-encore.
 
Vous avez également disputé les championnats du monde pour la première fois. Cette sélection en équipe de France était un objectif en début de saison ?
Non, pas vraiment. Honnêtement, j'avais même fait un croix sur l'équipe de France. Je n'avais pas été retenu certaines années alors que je méritais d'y être et du coup, je n'y pensais plus trop. Mais après le Tour de France, Nacer Bouhanni m'a demandé si j'étais motivé pour l'accompagner sur les Mondiaux. On a fait le point sur la Vuelta, Bernard Bourreau m'a retenu et voilà. Maintenant, je suis resté sur ma faim aux Etats-Unis : j'ai été pris dans un accrochage au niveau de la zone de ravitaillement et j'ai été contraint à l'abandon. Je n'ai pas pu aider Nacer dans le dernier tour. Bon, ça reste quand même une bonne expérience.

 

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